vendredi 24 février 2017

I-dolls - Part I.

"On dirait des poupées" est la réaction la plus commune que j'ai entendu devant le phénomène des idols aussi bien japonaises que coréennes. Des poupées, certes. Il serait facile de savoir qui "joue" avec. Une fois que l'indignation occidentale inhérente à une telle exubérance pop est passée, pour certains elles ne passent jamais, on peut apprécier les dites poupées. Après tout, ce sont des marqueurs d'une époque, les poupées représentent une esthétique de la jeune femme selon son époque. Les idol sont  en cela des poupées, peut-être pas de cire, mais bien de son. Elles sont aussi bien le miroir des modes de leur temps que de sa musique. Des témoins esthétiques de leur époque, ou quelque chose comme ça.

Bref, mon premier contact avec le monde des idol doit être autour de 2007-2008. Je devais errer sur youtube en cherchant un groupe de Visual Kei qui ferait la même musique que les autres, en mieux. Ou osciller entre Nolife et une autre chaîne qui ferait la même chose, en mieux. Dans les deux cas, la quête était vaine. Ainsi, je suis tombé sur un clip de Morning Musume. Seul le nom m'avait marqué. Une année plus tard, je tombais sur un autre clip dont je me souviens car je n'avais pas grand chose à faire durant l'été.

Je me rappelle des couleurs et des formes, mais pas de la musique. Ce qui est assez ennuyeux pour de la pop, je retournais donc chercher des groupes de VK qui n'existent pas.

Puis un jour, je ne sais comment, je tombais sur AKB48 à travers ce qui devait etre leur nouveau MV. Heavy Rotation. Dès lors, je savais que Heavy Rotation était the real thing, comme on dit. Bien sur, je savais que de passer du Metal (celui qui consiste à vénérer 3 ou 4 groupes des années 80...) au VK puis à la J-pop était un exercice d'acrobatie esthétique trop complexe, même pour moi. Je décidais d'ignorer l'appel des idol. Mais, il y a quelques années, on me confronta à l'objet qui devait réconcilier le monde de la musique, du moins brouiller les frontières entre les barbues et les petites filles.

C'était donc la fin de l'ère de la j-pop shame ou condescendante "japoniaiserie" parce que Kerrang et d'autres trucs très prestigieux dans le monde du headbang disaient que Babymetal, c'était le bien. Et parce que Babymetal, c'était effectivement le bien. Je me plongeais donc dans le monde des idol qui ressemblait fortement à celui du Visual Kei, eh oui, la vie est bien faite. Surtout au Japon, du moins dans son industrie de la musique. Je découvrais que Babymetal était à l'origine un sous-groupe du groupe d'idols, Sakura Gakuin. SG avait comme particularité d'avoir les membres les plus jeunes du monde des Idol japonaises. Je regardais donc des émissions sur youtube, car on a beaucoup de temps libre quand on a peu d'heures de sommeil. Les jeunes filles faisaient des quiz qui étaient mis en scène de A à Z, parodiaient des drama, ou allaient visiter des studios de musique. Tout un programme. Vers 16 - 17 ans, elles doivent quitter le groupe, terrible vieillesse. Ce départ  provoque une cérémonie de "graduation" très émouvante. Le terme "graduation" est celui qu'on utilise lorsqu'une fille quitte un groupe dans le monde des idol, ici, le sens est également scolaire. Les filles quittent le groupe à la fin du lycée. A l'époque ou Nakamoto Suzuka quitte le groupe, on lui a fait une jolie chanson.



Malheureusement pour elle, Babymetal est un succès à l'international. Elle est doit donc rester membre de Babymetal. En même temps son rêve était de devenir chanteuse comme elle le répétait à qui veut l'entendre dans les émissions de SG. Elle a fait même fait partie du  groupe proto-SG, Karen's Girls avec Muto Ayami (autre grande figure de la première génération de SG...). On peut même retrouver des vidéos d'auditions antérieurs avec des proto-groupes, ou avec sa soeur qui est également Idol. Elles sont dans le milieu depuis qu'elles savent lire. Il y a donc une dimension de dévotion à ce monde du spectacle. Les idol seraient un peu comme des prêtresses shinto modernes de petits villages comme le décrit Your Name. Elles ont une vie d'étudiante, de jeunes filles ordinaires mais doivent accompagner et mener des cérémonies quand il le faut. C'est peut-être l'origine des idol contemporaine à l'aune de leur déification par les otaku dans les années 90 (comme le montre Beineix dans son doc, somme toute un peu glauque...).

Alors que j'explorais les live de Babymetal, je tombais sur une chanson qui ne faisait pas partie du répertoire du groupe, ni de SG (oui, j'ai tout écouté !). C'était une reprise du groupe SPEED. Dès lors, j'apprenais que SPEED était un groupe légendaire dans la mythologie Idol, une sorte de Destiny Child  japonais. J'écoutais les albums, pas si mauvais mais pas si bon. Justement, White Love sortait du lot. Sinon elles étaient tellement célèbre que le "fou filmant" avait même été chargé de faire un film avec, Andromedia. Takahisa Zeze faisait les leader de VK, Miike les idol, chacun son délire.

Dans le même temps, je découvrais que la J-pop était un petit monde aussi étroit que le PAF. Kawase Tomoko composait et écrivait des chansons de Sakura Gakuin. J'aimais son groupe de pop des années 90s, The Brilliant Green, et son dédoublement de personnalité avec le projet TommyHeavenly6/TommyFebruary6. J'aimais un peu moins ses chansons pour SG, mais c'était sympa. Murakami Haruki racontait dans une interview à un journal français que la musique japonaise montrait que le pays était toujours renfermé. Je pensais que ce genre de déclaration était assez "poseur". Mais, il est Japonais et surtout écrivain, je découvrais sans réelle surprise qu'il avait raison. Un autre groupe commençait à faire parler de lui, Dempagumi.inc.  Après avoir écumé les salles en sueurs de otaku à Akihabara, les filles dempa se faisaient connaitre avec un hit.

Contrairement à SG ou à AKB, les filles de Dempagumi et leur esthétique 3.0 visait un public qui était inhérent à leur existence puisqu'il s'inscrit dans le nom du groupe, les denpa. En gros ce sont des otaku qui expliqueraient leur condition par une logique ou des comportements qui n'appartiendraient qu'à eux, avec un peu de new age pour faire passer le tout. Les Otaku des 2010s. Un peu comme les personnages de Gainax sous acides. Le groupe révèle un peu la même tristesse ou solitude "post-quelquechose" qui nourrit les chansons de Urbangarde ou de Kyary Pamyu Pamyu. Mais l’intérêt de Dempagumi, c'est surtout le single qu'elles ont partagé avec un autre groupe qui pour le coup a également bouleversé le petit monde des idol au point de disparaître dans son geste. Brand-new Idol Society aka BiS.

BiS était un groupe de jeunes femmes qui avaient déjà une expérience dans le monde du spectacle ou dans l'underground. Elles étaient DJ, modèles, danseuses, blogueuses...Elles commençaient le groupe au moment ou le tout venant des idol prenait une autre voie, vers le milieu de la vingtaine ou un peu moins. BiS existait comme une provocation, une alternative, une satire du monde des idol. Elles allaient au bout des fantasmes ou des mouvements que les autres groupes ne faisaient qu’effleurer pour respecter un code tacite de bienséance des idol. Au niveau musicale, elles ont tout essayé, du métal en passant par le shoegaze ou le noise. Elles faisaient leur carrière sur les tabous et les extrêmes de l'industrie pour en révéler la misogynie ou l'absurdité, voire simplement s'en moquer. Il y avait une énergie punk dans BiS. Il suffit de voir leur live, le fait qu'elles se fichent de chanter juste et de suivre une chorégraphie ou comment elles pouvaient virer les fans qui montaient sur scène à coup de pieds. Elles choquaient en déjouant les codes du porno dans leur clip "Die". Elles faisaient crucifier dans "Idol". Ou osaient se montrer en sang, en larmes, et en sueur dans "Bisimulation". Elles ont même fait un film pour aller au bout de la démarche, entre Sion Sono et Yamashita Nobuhiro. Idol is dead !

Puis elles se sont séparées en 2014. Certes, des membres ont crée un nouveau groupe, Billie Idle. La leader, Pour Lui, a continué une carrière solo, et tente même de réanimer le groupe pour lutter contre les ersatz. Tentenko qui était la touche kawaii mène également une carrière de DJ, et de musicienne en solo. J'ai donc dérivé dans le monde des idol post-babymetal. C'était pas la joie. J'ai découvert des choses comme les filles de PassCode qui surfaient tranquillement sur le "kawaii métal". Ou des trucs extrêmement insipides et sans scrupules. Enfin, des Babymetal en moins bien quoi.


Un jour d'errance sur youtube (oui j'ai beaucoup de temps libre...), je tombais sur une publicité de Gravity Rush.

Bien sur comme un être humain normal, je me fichais complètement de la PS Vita. Ça fait bien longtemps que c'était déjà un échec. Et meme si Gravity Rush paraissait cool, le véritable intérêt était Hayami Akari. Qui était-elle ? pourquoi jouait-elle à une console merdique ? Youtube mis fin à mes interrogations très vite en me suggérant une vidéo de Momoiro Clover. C'est un groupe d'idol qui a pour thème le sentai, il faut de tout pour faire un monden donc des idol sentai. Hayami Akari faisait partie du groupe jusqu'à ce qu'elle le quitte au début des 2010s, elle était trop bien pour ça. On le sait tous. Néanmoins, le groupe m'a diverti pendant quelques temps. D'ailleurs après le départ de Hayami Akari, le groupe s'était renommé, Momoiro Clover Z. Un peu comme Mazinger...ou Dragon Ball. Bref, la verte chante  bien. Véridique, j'ai vu un live...

Mais elles sont aussi tombées dans le "kawaii métal", avec l'aide de KISS. Oui, les vrais.  Il faut vraiment de tout. Le studio Trigger se charge du clip. Dream team.


Puis je continue à dériver, je tombe sur un clip du récent Necronomidol, de Fudanjuku  ou des groupes de "provinces". C'était sympa. Dans la foulé je télécharge, l'album de Fruitpochette comme une bonne victime de la mode que je suis. Bien sur, je me rends compte de l'erreur une semaine plus tard, mais c'est trop tard. Et puis c'est easy-listening, comme on dit.

Maintenant que Babymetal est passé dans Tracks et qu'elles font des featuring avec Judas Priest, plus personne n'a peur de rien. Les concepts idol pleuvent.  Les otaku occidentaux que l'internet des 2010s a renommé péjorativement weeaboo ou weeb pour les gens cools font du bruit pour un simili Babymetal mais avec un barbu australien à la place de Suzuka...C'est Ladybaby, la boucle est bouclée.


Aujourd'hui, Ladybaby ne compte plus que ses membres féminins. Dont l'énigmatique Rei Kuromiya.

finalement, AKB c'est pas mal. C'est même très bien. J'ai arrêté de suivre les groupes d'idol japonaises.De toute façon, ce n'est pas la poupée le problème, c'est l'époque qu'elle représente. Mais il n'y a pas que des groupes et pas que des idol japonaises !



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